En bordure d’un sentier de randonnée en forêt de Saint-Michel, il y a un arbre qui a un nom. Le Chêne Michel, du nom du forestier qui a veillé sur lui dans la première moitié du XX° siècle.
La chute du gland qui en tombant au sol a fait naitre ce chêne s’est passée aux alentours des années 1730. Il y a près de 300 ans !
Ce chêne solidement ancré au bords du chemin de promenade est né un demi-siècle avant la révolution française. Il a vu passer les campagnes napoléoniennes. Il avait cent ans à l’indépendance de notre Royaume. Il a entendu le vacarme et le carnage des deux guerres mondiales.
Il a germé quand le taux de CO2 dans l’atmosphère était de 275 ppm alors qu’il frise les 500 aujourd’hui. Il a grandi près d’un siècle et demi avant la révolution industrielle, dans des conditions climatiques stables depuis des millénaires.
Ancré irrémédiablement dans le sol de la forêt de Saint-Michel, il a entamé sa traversée du XXI° siècle (le quatrième déjà pour lui) avec l’hypothèque de 1,5°; 2,0°; 3° … d’augmentation de la température moyenne du globe.
Il partage avec tous les arbres qui l’entourent, hêtres, frênes, épicéas, érables … la plus grande période d’incertitude que les végétaux aient connue depuis des millénaires.
L’âge de ce chêne nous confronte à la seule notion de temps qui soit réellement pertinente. Le temps de la forêt. Il dépasse notre minuscule temps humain à tous. Il s’inscrit dans une durée qui nous dépasse tous. La forêt de 2100 aurait déjà du être ensemencée ou plantée il y a plus vingt ans. Et elle est sujette au plus grand des bouleversements que jamais la Vie n’a connu sur Terre en un laps de temps aussi court.
Le projet qui lie la Région wallonne à la Fondation Pairi Daiza s’est donné un horizon de temps à 80 ans. Une éternité déjà pour le temps du politique. Au-delà de notre petit temps humain personnel. Mais juste l’aube de l’adolescence pour un chêne.