L’évaluation de l’état de conservation : un concept clé pour la gestion forestière
Afin de concrétiser les ambitions formulées dans le Master plan, document directeur du projet Nassonia, un plan d’aménagement forestier est en phase de rédaction pour le mois de juin 2022. Il aura, entre autres, pour but de doubler les surfaces en réserves, de diversifier les espèces de la forêts et d’améliorer la qualité des habitats, etc.
L’objectif principal de l’évaluation au T0 du projet est de cibler les points forts et les problématiques propres aux habitats Natura 2000 de la forêt de Saint-Michel Freyr dans l’optique d’alimenter le plan d’aménagement et d’appliquer des mesures de gestion adaptées afin de de garantir le rétablissement ou le maintien du bon état de conservation.
Le principe et d’intérêt de l’évaluation d’état de conservation
L’état de conservation des habitats s’évalue à l’aide d’une méthode comparant l’entité observée (ici le type d’habitat à évaluer) à une (ou plusieurs) entité de référence pour ce type d’habitat. Et ce, à l’aide de tableaux reprenant plusieurs critères, indicateurs et seuils/valeurs de référence jugés adéquats dans la littérature et à dires d’experts et qui témoignent d’un état de conservation favorable, moyen ou défavorable pour un habitat spécifique (Carnino, 2009).
Les critères et indicateurs sélectionnés se doivent d’être pertinents et simples à mesurer.
Méthodologie
L’inventaire d’état de conservation a démarré dans le courant du mois d’avril et s’est prolongé jusqu’en juillet 2021. Ce dernier a été effectué par une étudiante de la section « agronomie » de la HEPH Condorcet à Ath pour son travail de fin d’étude au sein d’Ecofirst, équipe mandaté par la fondation Pairi Daiza.
Le choix des habitats Natura 2000 à évaluer, dans un premier temps, s’est porté sur les forêts alluviales (91E0) et les forêts de pentes, éboulis ou ravins (9180). Pourquoi ?
Ces deux milieux, rares, sensibles et en danger de disparition sur le territoire wallon, sont de grande importance écologique. En effet, ils abritent, tous deux, une flore particulière et sont essentiels dans le maintien de niveaux élevés de biodiversité au sein des massifs forestiers. Les deux habitats sont donc aujourd’hui, à Saint-Michel, sous statut de protection (réserves forestières dirigées et intégrales).
La méthodologie utilisée ici s’inspire de celle mise en place par le Muséum National d’Histoires Naturelles (MNHN) de Paris pour l’évaluation des habitats à l’échelle du site Natura 2000.
Sur le terrain
Pour chaque type d’habitat à évaluer, diverses caractéristiques (critères) sont étudiées par le biais d’indicateurs (variables qualitatives ou quantitatives à mesurer) relevés sur le terrain :
- Flore typique de l’habitat ;
- Intégrité dendrologique ;
- Espèces exotiques envahissantes ;
- Dynamique de renouvellement ;
- Bois morts ;
- Bois d’intérêts biologiques ;
- Très gros bois ;
- Atteintes localisées ;
- Atteintes diffuses.
Pour ce faire, les différents critères choisis ont été encodés dans l’application téléphonique Qfield ce qui a grandement facilité l’inventaire et le traitement des données.
L’état de conservation est obtenu en comparant les valeurs des indicateurs relevés pour chaque type d’habitat à des « valeurs seuils », déterminées par des experts sur le sujet. Selon les écarts à ces valeurs seuils, une note est attribuée à l'habitat et l'état de conservation correspondant est obtenu en reportant cette note sur cet axe :
Conclusion
Cet inventaire a permis de mettre en évidence les points forts actuels de ces deux habitats :
- présence élevée de bois morts, bois d’intérêt biologiques et très gros bois ;
- Absence totale d’espèces exotiques envahissantes.
Mais aussi, d’identifier plusieurs problématiques :
- Présence limitée de la flore diagnostique ;
- Régénération difficile des essences propres aux habitats ;
- Pression du gibier.
Les résultats obtenus ont permis de proposer des pistes de gestion ciblées qui seront étudiées pour la rédaction du plan d’aménagement forestier. La démarche effectuée pose un cadre quant à l’appréciation de l’état de conservation des autres habitats Natura 2000 présents dans le site mais elle permet aussi de faire l’état des lieux, au commencement du projet, afin d’estimer dans les années à venir les bénéfices de la gestion apportée.
Et ce, toujours dans le but d’augmenter la résilience de la forêt de Saint-Michel-Freyr face aux bouleversements présents et futurs.
Bibliographie :
Carnino, N. (2009). État de conservation des habitats d’intérêt communautaire àl’échelle du site – Méthode d’évaluation des habitats forestiers. Muséum National d’Histoire Naturelle / Office National des Forêts, 49 p. + annexes.